Dans une société de consommation dont le credo est « produire plus et vite », quelle est la place des industries qui revendiquent une production plus lente mais plus vertueuse ? Nicolas Castelain, directeur commercial de la Brasserie Castelain, Philippe Formentin, directeur général des établissements JC David, Romain Olivier du Fromager Philippe Olivier et Pierre Senechal, directeur associé du Café Meo, se sont exprimés autour de ce sujet. Tout au long de la conférence, ces chefs d’entreprises ont montré que répondre aux nouveaux enjeux environnementaux tout en répondant aux attentes de leurs clients était conciliable.
« La qualité d’abord »
Pour travailler dans l’artisanat, il faut être passionné. Les quatre entrepreneurs sont clairs sur ce sujet : le savoir-faire est un travail délicat qui demande du temps. Arriver à un résultat de qualité est tout un art. Il faut travailler la matière en répondant à chacun de ses besoins pour obtenir le meilleur d’elle. Pour Romain Olivier, la production de fromage est réalisée selon la demande du client. Dans cette production, le temps et la patience sont nécessaires. Mais si on arrive à un tel niveau d’excellence, c’est aussi grâce aux matières premières. Pour Philippe Olivier, la qualité du fumage destiné à conserver le poisson est d’abord influencée par le choix du bois. La confection de bons produits passe aussi par l’utilisation d’outils plus responsables, la précision des choix des matières premières et le temps passé à sa production.
Quelles actions responsables dans l’artisanat ?
La relation et la communication avec les consommateurs est primordiale dans ce secteur d’activité. L’action principale généralement sous-entendue de ce dernier est l’utilisation et la réalisation de produits issus de l’agriculture biologique. Cependant, ces chefs d’entreprises partagent le même point de vue : ce n’est pas nécessaire. Pour Pierre Senechal, le bio serait même à contrôler. Pour obtenir un produit de qualité, il faut avant tout entretenir les relations avec les matières premières, tester de nouvelles approches et savoir se remettre en question. Nicolas Castelain s’est lui lancé dans le bio local et écoresponsable pour sa marque « Jade ». Il ajoute que « rassurer le client, ce n’est pas forcément se plier aux réglementations actuelles », et souligne ainsi l’importance de la relation avec l’acheteur. Il faut se rapprocher du consommateur afin d’instaurer une relation de confiance et de lui expliquer le processus de production en toute transparence. En effet, les longues étiquettes collées sur les produits des supermarchés ne rassurent pas spécialement ces derniers.
Pour Philipe Olivier, agir durablement dans les métiers du savoir-faire c’est tout simplement retourner à l’artisanat où « tout se vivait au jour le jour ». Une telle démarche permettrait d’éviter le surplus de conservateurs dans les produits par exemple, ou encore limiter l’utilisation du plastique. Les actions, elles, sont là. Mais le consommateur acceptera-t-il de revenir à ce processus artisanal ?
Quelle importance du savoir-faire dans nos sociétés ?
On le sait tous : le savoir-faire disparaît petit à petit dans un monde qui ne cesse d’évoluer en termes de technologies. Pourtant, ces entrepreneurs insistent sur la nécessité de cette technique et sont déterminés à garder les traditions qui donnent des produits d’exceptions. Il faut donc transmettre cette passion, qui commence par la transparence des entreprises. Échanger sur le sujet, expliquer les tâches à entreprendre, accompagner les collaborateurs intéressés, promouvoir un sentiment d’entraide… Autant d’éléments qui sont à prendre en compte pour transmettre le savoir-faire. Selon, Pierre Senechal, il faut pouvoir attirer une jeunesse qui souhaite s’approprier des produits qui ont du goût.
« Humanité, persévérance et énergie » : voilà les trois principales qualités d’un faiseur. Les chefs d’entreprises sont unanimes. En clair, la passion quant à ce que l’on veut entreprendre est la clé d’un artisanat de qualité.
Clara Crassard