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13A / Émotion et écologie : comment les deux peuvent être mobilisés pour le progrès de la société et des entreprises

L’importance de l’émotion dans le cadre de la transformation de la société, afin de mieux répondre aux défis sociaux et environnementaux.

Présentée par Florent Levavasseur, Directeur conseil d’Utopies, cabinet pionnier en matière de stratégies de développement durable, cette conférence a permis de discuter de la motivation du changement et de l’engagement par l’émotion. Avec les interventions de Raphaëlle Haccart, Directrice du développement au Palais de Tokyo, Marie-Aude Tran, Galeriste à impact à Trifolium, Thierry Dujardin, président de la société d’investissement Side Invest, et enfin Anaïs Kasbach, Responsable Développement Durable chez Lunii ; une perspective unique est apportée au sujet. 

Le rôle de l’émotion dans l’art, une perspective institutionnelle et de développement de l’enfant

Tout d’abord, le rôle de l’émotion dans l’art selon le Palais de Tokyo est expliqué comme un moyen de voir la vision et l’imagination personnelle de l’artiste, son point de vue sur la durabilité et le monde qui l’entoure. Pour soutenir cette créativité, comme l’explique Raphaëlle Haccart, le centre d’art accompagne les artistes émergents dans la création de leurs œuvres, en organisant des expositions comme celle de 2022 intitulée « Réclamer la Terre », et en mettant à leur disposition des espaces de travail communs et des possibilités de collaboration institutionnelle. Cela concerne également le travail de Trifolium, car le pouvoir de lier l’impact émotionnel à une œuvre d’art peut conduire à des actions concrètes ou à des connexions significatives, comme un souvenir émotionnel ou une réaction publique plus large permettant une contribution financière comme le veut le fonctionnement de la galerie, plus particulièrement au sens écologique (sensibilisation à la déforestation et à l’importance de la biodiversité). 

Ce rôle de l’art et des institutions a ensuite été abordé par Anaïs Kasbach, à travers le travail de Lunii, qui examine l’impact de notre modèle économique de productivité sur le développement des enfants. Ils tentent de contrecarrer l’usage excessif des écrans (qui freine l’imagination) en utilisant la fiction pour permettre une progression de l’expression de l’enfant. En utilisant le langage (qui a un impact considérable dans la société et le monde professionnel), ainsi qu’un accès aux sites culturels, ils peuvent non seulement permettre aux enfants de prendre confiance en eux à travers l’art, mais aussi transmettre cette opportunité de découverte à leurs parents.

Entreprises et émotions : une force convaincante qui permet la durabilité

Thierry Dujardin de Side Invest a ensuite discuté de l’importance de l’émotion dans le monde du business et de la finance, en soulignant son potentiel de changement. En s’appuyant sur des exemples de start-ups ayant obtenu des financements grâce à l’utilisation de l’émotion dans leurs pitchs, il met sur le devant de la scène l’idée que l’émotion est une influence, et qu’elle peut provoquer des transformations permanentes, comme l’a démontré la pandémie de COVID-19. Il est convaincu, à travers ses expériences personnelles, que la charge émotionnelle d’une proposition commerciale lui confère une force inégalée, ainsi qu’une réelle légitimité. Cette légitimité motive donc également la participation de la jeune génération, qui apporte son pragmatisme et ses intérêts sociaux et écologiques. Utopies privilégie ce même rôle de l’émotion, comme l’explique Florent Levavasseur, en créant un lien entre différents mondes par le biais de l’art, notamment entre la pensée et la musique.

Raphaëlle Haccart rappelle ensuite l’impact similaire que peut avoir la permaculture institutionnelle telle qu’elle est pratiquée au Palais de Tokyo, montrant comment la durabilité, non seulement dans la logique de la production artistique, mais aussi dans la logique de la psychologie et de la santé mentale, peut créer un modèle d’entreprise plus solide dans son ensemble. 

Ceci peut être utilisé pour donner un certain nombre de conseils aux nouveaux acteurs émergents du monde professionnel (comme les entrepreneurs ou les étudiants), qui voient que nos modèles de fonctionnement doivent être radicalement changés en conséquence de l’urgence de plus en plus évidente d’un modèle respectueux du climat. Le thème de la technologie a été à nouveau évoqué, dans le sens où une utilisation plus sobre de celle-ci est nécessaire, afin de privilégier la simplicité et la créativité, en particulier dans le cas des enfants.

L’influence locale et de la population, part considérable du progrès et des activités des entreprises

Thierry Dujardin passe ensuite à l’importance de la motivation et de l’action locale, comme le montrent par exemple les actions de la Cité des Échanges (où se tient le World Forum for a Responsible Economy), dont il est le directeur général chez Entreprises et Cités. Il a évoqué une consommation responsable, comme en témoignent les bilans carbone, mais aussi une créativité culturelle qui permet de trouver de nouvelles solutions. Dans le cadre de ses autres fonctions, il a pu constater que les émotions créent une ouverture d’esprit et permettent de changer les choses et d’aider ceux qui en ont besoin (comme dans le cas d’un étudiant qui n’était pas en mesure de réaliser son plein potentiel en raison d’un manque de ressources, qui a ensuite été résolu). Il a ensuite discuté de l’importance d’un lien territorial et régional, comme il l’a constaté dans le cas du club de football RC Lens, dont la motivation des supporters a créé un véritable élément d’attractivité du territoire ainsi qu’une opportunité de compétitivité pour les entreprises (en raison du développement économique). Ainsi, selon lui, dû à ce poids, les supporters peuvent influencer les clubs sportifs pour qu’ils aient un fonctionnement plus écologique.

Cette importance de l’inclusion de chaque partie de la population apparaît enfin dans le travail de médiation du Palais de Tokyo, qui fournit des services internes pour permettre aux visiteurs de comprendre et d’interpréter les œuvres d’art d’une manière complète et significative, comme cela peut être appliqué au sujet du développement vert et de l’art défendant la planète. Il a également été souligné que l’émotion négative pouvait également être un moteur dans cette logique, car elle pouvait aider les personnes à prendre conscience de la nécessité réelle du changement, de la connexion et de la collaboration. 

La conférence s’est enfin achevée en demandant aux participants ce qu’ils avaient vu ou vécu récemment et qui avait suscité en eux une certaine émotion. À cette question, les intervenants ont mentionné notamment des expositions de musées traitant de questions sociétales actuelles, ainsi que d’autres évènements mettant en exergue la difficulté de s’élever dans la société sans base, autant de sujets qui ont chacun trouvé leur place dans les réflexions et les sujets prioritaires de nos participants.

Céilí Boudignon