Interview

Croc la vie, ou comment « entreprendre sans prendre » dans la restauration collective

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Entreprise de restauration biologique pour les moins de 3 ans basée dans les Hauts-de-France, Croc la vie a mis en place de nombreuses actions en faveur d’une efficience écologique dans l’ensemble de son activité. De la terre à l’assiette, retour sur une organisation engagée dans l’alimentation durable et locale, venue partager son expérience au cours du World Forum Saint-Omer le 19 octobre dernier. Un témoignage de Guillaume Jourdain, directeur général de l’établissement.

Comment engagez-vous vos employés et partenaires dans cette démarche d’efficience écologique ?

Pour les employés, c’est assez informel, mais la conscience environnementale est quasi devenue un critère de recrutement. Ce n’est pas le cas sur tous nos métiers, mais pour les cadres et postes à responsabilité, c’est un élément très important pour une activité comme la nôtre afin de pouvoir la prendre en compte dans chacune des décisions. Chez Croc la Vie, nous pensons toujours rentabilité, efficacité, mais aussi qualité et impact environnemental du côté de nos collaborateurs comme de l’activité.

Nous n’imposons rien à nos partenaires, étant donné que nous les choisissons en fonction de ce même critère.  Pour les matières premières, notre premier fournisseur est une coopérative régionale de producteurs de fruits et légumes locaux et bio. Concernant la gestion des déchets, nous travaillons avec l’entreprise Gecco, qui collecte et valorise nos biodéchets sur les filières de compostage ou de méthanisation locales. Nous nous refusons de travailler avec des grossistes qui ne proposeraient pas une offre 100% biologique, car nous avons envie de soutenir les acteurs avec qui nous partageons les mêmes valeurs. C’est donc dans le choix que réside notamment notre engagement à ce sujet.

Comment mesurez-vous le résultat de cet engagement ?

A ce jour, cet engagement est tellement ancré dans notre ADN, que nous en oublions parfois d’en mesurer tous les impacts. C’est un des points sur lesquels nous travaillons actuellement. En pleine expansion, certains fonds d’investissement dans l’économie sociale et solidaire (ESS) ou encore de l’agroalimentaire avec lesquels nous collaborons nous challengent désormais sur cet aspect. Notre activité soutient un peu plus de 20 hectares d’agriculture bio dans les Hauts-de-France.

C’est un excellent axe d’amélioration, car cela nous permet de repérer là où nous sommes efficaces, mais aussi d’aller plus loin dans nos démarches pour avoir un impact encore plus positif.

Quels sont vos projets à venir ?

A travers la construction de ce nouveau bâtiment dans le territoire de Saint-Omer, nous reprenons les éléments ayant fonctionné, et n’hésitons pas à mettre de côté ce qui ne nous correspond plus. Par exemple, notre cuisine actuelle a été pensée pour avoir un minimum d’impact environnemental négatif avec une chaufferie bois, de la récupération d’eau de pluie et de chaleur des groupes froids. Grâce à cette première expérimentation, nous avons pu revenir sur la décision d’utiliser du CO2 pour le froid, car en termes de maintenance et d’efficacité, nous réalisons par expérience que ce n’est pas l’idéal.

Par ailleurs, un aspect sur lequel nous avons peu de moyens d’actions concerne nos camions de livraison. Il est impossible pour nous à ce jour de remplacer nos véhicules essence et diesel par de l’électrique ou fonctionnant au gaz à cause des groupes froids. Maintenir les repas à la bonne température nécessite beaucoup d’énergie. Pour autant, nous nous sommes questionnés sur les autres moyens d’actions dont nous disposions sur cet aspect de mobilité. Nous avons alors fait le choix de mettre en place une formation à l’écoconduite, afin que nos livreurs puissent adopter une conduite plus souple, consommer moins de carburant et que le matériel se dégrade moins rapidement. Nous essayons, en somme, d’être pragmatiques, et d’agir au fur et à mesure. La prochaine étape est de mettre en place des indicateurs pour avoir plus d’impact, afin de mesurer en sachant où aller et sur quels points agir.

Selon vous, quels intérêts les entreprises ont-elles à se saisir du sujet de l’efficience écologique ?

Au-delà de prendre en compte le sens de la responsabilité environnementale dans nos recrutements et partenariat, il s’agit là d’un véritable vecteur d’accompagnement sur lequel les évolutions des comportements et prise de conscience de chacun sont visibles. Nous avons vu des personnes qui, bien que peu sensibilisées sur la question au départ, sont aujourd’hui devenues intransigeantes.

Ensuite, nous incitons aussi nos partenaires à faire mieux, comme nos clients nous poussent, nous aussi, à nous améliorer. C’est le cas de certaines crèches, qui nous ont sollicité dans l’utilisation de barquettes réutilisables, bien que nos contenants actuels soient récupérés et recyclés. Nous avons l’envie de le faire, qui ne peut être que décuplée face à ces sollicitations. Il y a aujourd’hui une incitation croissante de la part des clients qui exigent un impact environnemental négatif le moins important possible. C’est cette même émulsion qui se créée aujourd’hui, qui viendra favoriser les entreprises les plus vertueuses de demain.