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20A- Le territoire est une marque

« Local branding ». Derrière cette expression glamour mais obscure se cache une réalité : le local est attractif et plein de potentiels. Avec les enjeux de le Responsabilité Sociale des Entreprise (RSE), l’échelle locale est devenue incontournable pour les entreprises. C’est l’occasion pour elles de réinventer leur stratégie de marketing en intégrant pleinement l’idée du local. Des villes comme Vancouver souhaitent que le territoire devienne une marque. Alors comment se manifeste le local branding et que change-t-il dans nos villes ?  

 

© Maxime Dufour Photographies

Nos deux intervenants Paul Saginaw et Gilbert Rochecouste, ainsi que l’entreprise Akzo Nobel sont venus nous présenter trois visions différentes du local branding, inspirés de leurs propres expériences. Un seul point commun : créer du sens.

Brand urbanism- « Il faut investir dans la villes »

De plus en plus de marques financent des projets d’urbanisme. Si l’idée peut surprendre, elle est néanmoins ingénieuse lorsque l’on constate que d’une part, les budgets municipaux s’amenuisent et que d’autre part, les marques cherchent à développer une image de marque positive. Avec la stratégie du « brand urbanism », des marques financent des projets de développement urbain en échange de visibilité. Au lieu de dépenser une partie de leurs fonds dans des campagnes publicitaires classiques, elles décident d’impacter la vie des populations concrètement dans leur quotidien en améliorant leur cadre de vie.

C’est cette démarche qu’a entrepris la marque Akzo Nobel avec son programme « Let’s colour ». Passionnée par la couleur, l’entreprise nous explique qu’elle a voulu apporter de la vie dans des villes qui manquaient de gaité. Partout dans le monde, c’est plus d’un million de litres de peinture qui a été utilisé pour dessiner des fresques, repeindre des bâtiments mais aussi peindre des terrains de sport en trompe-l’œil dans des zones où l’aménagement est compliqué.  Pour la marque, si des espaces communs sont créés, aménagés alors les populations se rencontreront et pourront ensemble continuer de bâtir les villes de demain.

Local business model – « Il faut faire partie prenante de la ville »

Certaines entreprises choisissent de s’implanter dans une communauté, sur un territoire particulier et de focaliser leur développement sur ce niveau local. C’est ce qu’a décidé de faire Paul Saginaw il y a plus de trente ans en ouvrant son restaurant Zingerman Delicatessen dans l’Etat du Michigan aux Etats-Unis. Au-delà de la volonté de vouloir offrir des produits et un service de qualité qui deviendront la signature de l’établissement, l’entrepreneur et son partenaire souhaitaient devenir une institution du quartier en offrant aux habitants de vrais moments de vie.

« On voulait faire partie de la communauté et lui être bénéfique » explique-t-il. Il ajoute, « on gagne le droit de faire du business sur un territoire en créant de la valeur ajoutée et en réinvestissant cette richesse dans le territoire qui nous accueille ». Pour ce faire, ils travaillent avec des producteurs locaux et sont investis dans la vie du quartier.

Rester local et qualitatif était depuis le début leur vision du business. C’est pour cette raison que plutôt d’ouvrir d’autre Delicatessen ailleurs dans le monde, ils ont décidé d’ouvrir des commerces différents comme une boulangerie ou une fabrique de confiserie. L’idée reste la même : enrichir la communauté dans laquelle ils sont implantés en créant de l’emploi et en assurant des prestations soignées.

Aujourd’hui la communauté de business Zingerman comprend onze commerces et elle est prête à s’agrandir. En effet, « Toute personne qui veut construire un projet et rejoindre notre communauté est la bienvenue » invite Mr Saginaw.

Place making – « Le futur est commun »

Et si finalement ce qui comptait le plus dans le concept de territoire, c’était la communauté qui l’habitiat ? Pour Gilbert Rochecouste, directeur général du cabinet de conseil Village Well, spécialisé dans le « Place Making », il est primordial que les citoyens se réapproprient les espaces publics afin de donner du sens à nos territoire.  

Avec le processus de la mondialisation, nos villes se sont homogénéisées et nos comportements se sont individualisés. « Il faut réenchanter la ville!” s’exclame-t-il. Pour cela, il préconise de recréer des espaces communs. Il précise que « nous devons réunir les gens et avec toute cette énergie créer quelque chose de positive ».

Pour illustrer son propos, l’intervenant utilise l’image du village. Nous devons raisonner en termes de communauté villageoise, multiplier les interactions pour que les citoyens se sentent appartenir à une communauté. Certaines marques se sont engagées dans un processus de création d’espace de vu. Par exemple, les magasins Décathlon ont ouvert des Décathlon village au sein desquels les consommateurs peuvent pratiquer du sport et rencontrer d’autre sportifs pendant qu’il procède à leurs achats. Dans la même idée, un nombre croissant de ville encourage les initiatives qui amènent les citoyens à se rencontrer, comme les festivals.  

« The Place is the new black »

La formule de M. Rochecouste est audacieuse et résume bien l’idée que la notion d’échelle locale est devenue centrale. A travers le local branding le territoire devient une marque positive. Habitants, collectivités territoriales et entreprises peuvent réinventer les modèles de développement et d’aménagement, et ce par la coopération.

 

Mathilde Bigot