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La pomme de terre, un secteur agricole durable ?

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Dans cette deuxième partie de la conférence “Nourrir la planète : comment massifier une agriculture performante et durable ?”, un focus sur le milieu de la pomme de terre nous permet de creuser des sujets plus techniques et primordiaux dans les changements de paradigmes alimentaires.

“La ferme au magasin” ?

La conférence commence par introduire Stéphane Darguesse, cofondateur de A2pasd’ici, un concept de place de marché implantée au cœur de la Grande Distribution. L’idée ? Ramener “une partie de la ferme au magasin”. C’est un moyen de rendre facilement accessible une alimentation plus saine et plus responsable. Ce réseau de producteurs existe pour fédérer, promouvoir et vendre les produits des agriculteurs plus facilement. Avec la covid-19, on a assisté à une réelle volonté des français de soutenir le milieu agricole en consommant localement. Le projet a pour but de pérenniser cette évolution, en intégrant directement les agriculteurs aux lieux de consommation des consommateurs. C’est une technique qui permet également la création d’un lien de confiance, les producteurs peuvent discuter avec les consommateurs, ce qui facilite le travail de transparence et de traçabilité.

Le marché de la pomme de terre

La présence de Bertrand Achte, agriculteur et président du GAPPI et de Maxence Turbant, directeur agriculture France et Belgique de McCain, nous a permis d’approfondir sur le marché de la pomme de terre. Tout d’abord, comme l’explique Bertrand Achte, l’aspect local de la production et de la transformation de la pomme de terre est logique : c’est une culture plus fragile, emplie d’eau, qui ne peut donc que très peu voyager. Maxence Turbant rappelle l’imposant marché de McCain : ils produisent 1 frite sur 4 en France et en Belgique. La taille de leur marché suppose une empreinte écologique importante, un défi qui a poussé l’entreprise a intégré des valeurs environnementales et sociales à leurs activités. McCain s’engage à l’horizon 2030 de se reconvertir dans l’achat de matières premières issues de l’agriculture de régénération. Le but : remettre le sol au cœur du système de production, ce n’est plus qu’un simple support, c’est un élément à part entière dans la chaîne de production. C’est un engagement qui comprend la réduction des produits phytosanitaires mais également la réduction de l’utilisation de l’eau.

McCain et la crise sanitaire

Pendant la crise sanitaire, McCain a subi une baisse de vente atteignant jusqu’à 70%, avec un excédent de 100 000 tonnes de pommes de terre. C’est par le biais de la contractualisation (1 ou 3 ans) que les agriculteurs ont pu garder une situation financière stable : l’entreprise s’était engagée via des contrats d’acheter malgré les baisses de vente. Ils ont redirigé leur surplus alimentaire vers des banques alimentaires, mais également pour l’alimentation des animaux. Cela souligne l’importance du rôle du groupement et des partenariats, l’intérêt du collectif, en créant une équité entre les producteurs qui travaillent avec les industriels.

Les français prêts à investir dans une pomme de terre durable ?

Selon eux, les français sont bien prêts à débourser plus pour une alimentation plus saine, durable mais surtout locale. Cependant, ils ont besoin de comprendre ce changement, notamment grâce à des normes et des critères de référencement. Il faut cependant rester méfiant face à l’abondance des différents critères qui peuvent mener le consommateur a un flou total. L’utilisation du QR code par exemple pour suivre l’exploitation les techniques de productions, tout le cheminement de la ferme jusqu’à l’assiette est par exemple une belle réponse au problème de transparence et de traçabilité. Bertrand Achte va ainsi mettre en avant le logo HVE, qui permet d’identifier des produits qui garantit une technique et des qualités de production durable.

L’agriculture en 2050, c’est quoi ?

Pour Maxence Turbant, l’agriculture en 2050, c’est une innovation dans les pratiques, avec de nouveaux critères et outils. On parle d’aide à la décision, d’outils de calcul d’apport en eau, de modèles météorologiques, d’outils d’identification du mildiou… Malgré tout, une agriculture plus résiliente, c’est une production avec plus de défauts et de maladie. C’est aux industriels de comprendre comment retirer ces défauts, mais c’est également aux consommateurs qu’il incombe la tâche de comprendre qu’une production propre ne peut pas atteindre le niveau de production actuel. Le secteur agricole est particulier car il n’offre pas la possibilité de tests à foison : contrairement au secteur de l’automobile par exemple, l’agriculture, elle, ne peut faire “qu’un tour de circuit par an”.

Et comme le mentionne Bertrand Achte, l’agriculture se doit régénératrice. Il le rappelle, elle permet de stocker plus de carbone que les forêts, il serait donc nécessaire de miser dessus.

Lola BROCHART