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« 61% des consommateurs font plus confiance aux marques et entreprises qu’à l’État pour régler les problèmes environnementaux »

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C’est lors d’une conférence sur les différents moyens de faire vivre une marque à l’ère de la transition qu’Alice Vachet, créatrice du podcast l’Empreinte, accueille Laetitia Cousi, Jean-Philippe Sloves et Michael Rogué. Alice Vachet écoute et pose des questions devant une salle attentive. S’en suit alors une séance de questions très riche avec la salle. 

Alice Vachet est la créatrice du podcast l’Empreinte (numéro 1 en France sur les sujets RSE). Laetitia Cousi est responsable RSE France chez Dell Techonlogies depuis 2015. Jean-Philippe Sloves accompagne la transformation de La Redoute en tant que Directeur de la Communication Corporate et de la RSE depuis 2014. Enfin, Michael Rogué est Leader Planet chez Boulanger. Après 15 ans dans la transformation digitale, il a décidé de se consacrer à la transition écologique par conviction. 

Une communication honnête

L’un des premiers points relevé par Laetitia Cousi lors des premiers échanges est la transparence. Il s’agit, selon elle, du meilleur moyen de sensibiliser les consommateurs à la transition écologique. « Il faut être sincère et impliqué et lancer des actions qui auront un impact tant international que local » : la transparence et la sincérité sont clés dans la démarche des actions et des résultats. La communication transparente est très importante chez Dell pour aider les entreprises et les particuliers à recycler leur matériel en fin de vie notamment. 

L’un des principaux objectifs de La Redoute est de permettre aux familles une consommation plus responsable. Cela passe par l’affichage des produits et d’un certain nombre de données. La Redoute travaille en interne pour récolter et mettre à disposition un certain nombre d’information concernant l’impact environnemental de ses produits. De plus, Jean-Philippe Sloves exprime le souhait d’inscrire de volet RSE dans toutes les entreprises et de rendre cette mesure dynamique. « Cette neutralité carbone, il va falloir la justifier et la prouver ».

Michael Rogué nous parle de l’importance de regarder l’ensemble de la chaîne de valeur lorsque l’on fait un bilan carbone et d’aller jusqu’au Scop3 (regarder en amont et en aval de la chaîne de valeur, de la fabrication à l’utilisation). Il nous explique l’importance d’informer le consommateur sur le produit qu’il achète. Il utilise l’exemple d’un ordinateur portable : là où le consommateur a l’impression que le déchet est simplement la boîte en carton, il y a pourtant une multitudes de déchets invisibles. En effet, produire un ordinateur portable nécessite 250kg de pétrole, une trentaine de métaux qui se raréfient, une tonne d’eau, une tonne de déchet mais aussi du CO2 à l’utilisation.

Engager les parties prenantes 

Tous les intervenants mettent en avant l’importance de la coopération et du collectif dans la transformation énergétique. Selon Laetitia Cousi, les enjeux principaux concernent l’écoconception : Dell a innové des programmes très tôt (utilisation de plastique en circuit fermé), réutilise de la fibre carbone du secteur spatial (pour les coques d’ordinateur notamment) et, plus récemment, recycle des métaux rares et de l’aluminium. Toutes ces actions se font en partenariat avec d’autres : « C’est en s’associant avec d’autres entreprises que l’on pourra agir plus fortement sur les aspects environnementaux ».

Selon Jean-Philippe Sloves, l’enjeu concerne les produits et les consommateurs. Chez La Redoute, tous les invendus sont donnés à des associations, l’objectif ‘zéro plastique’ sera atteint en 2030 et dès l’année prochaine, les emballages plastiques les plus petits seront remplacé par du papier kraft. Néanmoins, cela ne peut pas être fait en solitaire. La Redoute a besoin de l’engagement de ses collaborateurs, fournisseurs et d’un certain nombre de partenaires. Jean-Philippe Sloves nous explique que « chez La Redoute, nous pensons que la RSE est une affaire d’engagement des parties prenantes et la communication joue un grand rôle là-dedans »

Michael Rogué nous parle de plusieurs initiatives menées chez Boulanger : un plan de transformation écologique sur les émissions directes, le verdissement des moyens de transport, la baisse dans la consommation d’énergie dans les magasins. Boulanger s’occupe aussi des émissions indirectes qui concernent les marques distribués dans ses magasins en les appelant à l’écoconception. Cela appelle donc à une coopération : « Nous travaillons main dans la main avec les marques pour écosélectionner les produits les plus responsables ». Boulanger propose une relocalisation des savoir-faire, une accélération des services durables mais aussi la meilleure fin de vie possible pour les produits. « Chaque citoyen du monde et d’un pays industrialisé et développé comme la France va devoir adopter son mode de vie vers un modèle plus responsable », soutient Michael Rogué.

Prendre le temps 

Laetitia Cousi déplore une précipitation. Elle nous explique que tout le monde essaie d’agir, ce qui est une bonne chose, mais les actions devraient être plus préparées. De plus, il n’est pas possible d’avoir un produit à empreinte carbone nulle : « On n’évitera pas la compensation carbone ». Parfois, cela n’est pas possible. L’enjeu est donc d’aller au maximum de la réduction et au minimum de la compensation. 

Selon Jean-Philippe Sloves, on ne peut pas basculer du jour au lendemain vers l’écoconception. La transition est progressive : elle se fait au travers du choix des matières, de la production à la demande ou encore des collections recyclés ou upcyclés. « On n’ira jamais au zéro émission » : il faut revenir à un niveau d’activité humaine supportable pour la planète. Le calcul est nouveau pour les entreprises. La Redoute est encore dans l’innovation, l’entreprise investit en interne pour récupérer des données mais cela prend du temps. Par exemple, pour les labels de bois durable, une personne à temps plein est nécessaire pour récolter les données.

Pour Michael Rogué : « plus on avance, plus on se rend compte qu’il faut creuser ». La transition climatique prend du temps. Il nous explique qu’il faut analyser chaque étape du cycle de vie du produit et mesurer au plus fin. Cela prend beaucoup de temps et d’énergie puisque, pour vraiment voir la différence d’impact carbone, il faut entrer dans chaque produit. Mais, malgré cette complexité et l’urgence de la situation, il est très important de le faire pour mesurer. « On doit tous œuvrer ensemble vers une neutralité carbone au niveau mondial ». 

Lucie LERNOULD