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Crise climatique : la bombe à retardement dans les entreprises

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20I – J’ai la capacité de m’adapter aux impacts du changement climatique

 

On nous répète continuellement que le devoir des entreprises est de modifier leur processus de production pour devenir éco-responsables. Mais on oublie souvent que l’impact des changements climatiques sur l’activité des entreprises est un enjeu fondamental, tant pour la production et la distribution, que pour la durabilité des produits et, par conséquent, des sociétés. Il est donc nécessaire et même primordial de s’adapter à ces risques climatiques.

 

 © Maxime Dufour Photographies

« Capacité d’adaptation », tel était le mot d’ordre du workshop de ce mercredi 16 octobre dans le grand hall de la CCI. Dans cette optique, les représentants de trois entreprises ont partagé leurs expériences.

Rockwinds, petite structure spécialisée dans la vente de cacao, est au cœur de ces enjeux d’adaptation au changement climatique. Non seulement le prix de cette denrée varie en fonction des conditions météorologiques, mais son avenir même est menacé. C’est pour répondre à ces défis que l’entreprise a décidé de se lancer dans la recherche scientifique, en embauchant la climatologue Alina Gainusa-Bodgan.

Nous en avons déjà tous fait les frais, le réchauffement climatique a également des conséquences sur nos voies de communication routières et ferroviaires. Resallience, présenté par l’intrapreneur Karim Selouane, est le bureau d’étude du groupe VINCI, consacré à l’adaptation des projets et infrastructures à ces changements.

Enfin, l’entreprise canadienne Mountain Equipment Coop (MEC), qui distribue du matériel et des vêtements de plein air, a vu l’ensemble de sa chaîne de valeur impacté, des matières premières, à la demande, en passant par la logistique. C’est Véronique Mariotti, experte en risque climatique de l’entreprise EcoAct, qui expose les stratégies de MEC.

Ces trois sociétés ont su apporter les aménagements nécessaires à leur fonctionnement pour faire face à ces difficultés, en s’appuyant sur quatre piliers.

 

Ressources financières

Pour mettre en place les infrastructures indispensables à cette adaptation, il est impératif de mobiliser les ressources financières suffisantes. Tandis que Rockwinds fait appel au Crédit d’impôt recherche, MEC met l’accent sur l’évaluation de l’impact financier de ces risques pour réviser son fonctionnement.

 

Ressources techniques

L’agroforesterie, technique qui consiste à créer de l’ombre sur les cacaotiers pour diminuer l’impact de la hausse des températures et augmenter l’humidité, est mise en avant par Rockwinds pour faire perdurer la production.

Résallience lie approche technique et approche géographique dans un objectif d’anticipation des aléas. En prenant en compte l’ensemble des facteurs tels que la densité de population d’un territoire particulier ou la concentration d’infrastructures, l’entreprise peut prévenir les accidents potentiels et mettre en place les dispositifs nécessaires.

MEC, quant à elle, a entrepris de diversifier ses lieux d’approvisionnement, de délocaliser les entrepôts situés dans les zones à risques et d’adapter sa production grâce à une meilleure gestion des stocks.

 

Considérations organisationnelles

L’adaptation des entreprises au changement climatique requiert également une réorganisation de leur fonctionnement. Les liens d’interdépendance créés entre le groupe VINCI, ses partenaires et d’autres acteurs appartenant à des domaines très différents en témoignent. Ces relations sont très importantes dans la démarche d’anticipation des risques et des éventuels effets dominos. Cette réorganisation se traduit, chez Mountain Equipment Coop, par la formation des comptables à l’identification des risques.

 

Ressources humaines

La prise en compte des compétences spécifiques des salariés, les efforts de communication et de pédagogie, ainsi que la part de l’activité de l’entreprise consacrée à la gestion de l’impact du changement climatique sont des éléments à ne pas oublier. Dans ce contexte, Rockwinds fait appel au cabinet de conseils IXEO-Conseil et s’attache à s’implanter directement dans les zones de production de cacao, grâce à la présence d’une collaboratrice au Ghana.

MEC a, quant à elle, mis en place en interne des structures de formation des salariés, notamment des comptables, basées sur la culture de l’échange.

 

Ces entreprises illustrent parfaitement le fait que le renforcement des capacités d’adaptation au changement climatique n’implique pas forcément un surcoût ou une contrainte supplémentaire. Au contraire, selon Stéphane Simonet, directeur général d’ACTERRA, cela représente un réel critère de compétitivité et permet d’établir une stratégie sur le long terme, tout en diminuant les risques de vulnérabilité. En s’appuyant sur les quatre dimensions énoncées, chaque entreprise peut devenir plus flexible et éviter les conséquences négatives du réchauffement climatique.

Néanmoins, la mise en œuvre de ce processus peut parfois avoir des conséquences négatives sur l’environnement. Karim Selouane souligne que dans certaines situations, le plus important n’est pas d’être « bas carbone ».

Dès lors, l’enjeu est de lier renforcement de ces capacités d’adaptation et préservation de l’environnement, et ainsi éviter d’entrer dans un cercle vicieux qui ne ferait qu’aggraver la situation actuelle.

 

Candice SCHMITZ