Le rideau tombe ce 21 novembre sur le premier jour de l’édition 2023 du World Forum for a Responsible Economy, laissant place à une plénière de clôture riche en perspectives inspirantes.
Une transition massive et collective, voici ce qu’il nous faut pour inverser la tendance actuelle vers une économie plus responsable. C’est en tout cas ce que soutiennent les intervenants de cette plénière au World Forum for a Responsible Economy. Cet appel à l’action, basé sur l’interconnexion des acteurs et des échelles, résonne comme un appel à l’unification des forces vives de notre planète pour un avenir durable.
L’interconnexion nécessaire des acteurs et des échelles
-2%, c’est la conséquence des investissements à date de la planète pour réduire les gaz à effet de serre, à horizon 2030, alors que la cible est à -34% dans les pays occidentaux. En parallèle, entre 2012 et 2019, les émissions de CO2 ont baissé de -11% dans notre région. Ces chiffres illustrent bien la thématique de ce World Forum for a Responsible Economy, édition 2023 : la région compte sur la planète, et vice versa !
Le local tire sa force du global et cette interconnexion a été le fil conducteur des discussions. Les intervenants ont souligné que ni un territoire ni une entreprise ne peuvent réussir à opérer une transformation significative en isolation. Ils ont plaidé en faveur d’une coopération à l’échelle locale, nationale, européenne et internationale, mettant en avant l’importance des écosystèmes collaboratifs pour soutenir et amplifier les initiatives locales. Cette approche intégrée vise à créer une synergie entre les différentes échelles d’action, garantissant ainsi une transition harmonieuse et efficace.
« La collaboration est clé, on ne peut rien faire seul », souligne ainsi Nigel Topping, champion de haut niveau pour l’action climatique. L’expert parle même de « boucle d’ambition » alimentée par les différents acteurs et rouages du développement durable, à chaque échelle – locale, nationale, internationale – et dans tous les domaines.
Notamment côté logement ! Et de ce côté-là, la parole est à Philippe Rémignon, président du directoire de Vilogia S.A. « Aujourd’hui, on construit en émettant beaucoup moins de carbone, on fait attention très en amont de la construction, en ayant deux ou trois règlementations énergétiques d’avance », souligne ainsi Philippe Rémignon, « de même pour la réhabilitation, nous avons décidé de massifier. Enfin, on change le mode de chauffage, d’énergie de nos logements. » La facture carbone baisse ainsi à échelle de quartier, et non plus de foyer.
Une jeunesse engagée et connectée à ses ainés
Et les jeunes dans tout ça ? « Moi, ce qui m’intéresse, c’est l’intergénérationnel », répond à cela Tara Goodwin, cheffe de la délégation française Sommet Jeunesse du G20 2023, « il faut s’écouter et se comprendre les uns les autres, on vit tous sur la même planète ». « C’est ensemble que l’on résoudra les défis de la cohésion pour former une société engagée », appuie Alexandre Malafaye, écrivain, essayiste et porteur de Synopia.
Nombreux sont les jeunes qui se sentent concernés par ces thématiques. C’est le cas notamment de Sophia, intervenante surprise du World Forum for a Responsible Economy, qui raconte sa réalité ce mardi soir sur scène. « Chez moi, on brûle et on se brûle les ailes », martèle-t-elle. Sophia énumère les douleurs du bassin minier et de sa jeunesse, mais également ses espoirs. Si Sophia y croit, alors nous lui devons d’y croire aussi. Ensemble, encore une fois.
Et en parlant des jeunes et de leurs vécus, Alice Guilhon, directrice générale SKEMA, présente alors un sondage impressionnant réalisé auprès de… 45 000 jeunes. « Écoutons-les pour connaitre leurs visions », insiste la directrice. Six questions ouvertes ont ainsi été posées à ce panel : « Que pensez-vous de la société ? », « Que souhaitez-vous pour l’avenir ? » n’en sont que deux exemples.
« Il y a des jeunesses, et non pas une », conclut Alice Guilhon après réception des contributions à ce sondage. Les peurs et aspirations diffèrent en effet entre l’Ouest et le reste du monde, semble-t-il : peur de perdre un certain confort financier et matériel d’un côté, peur de l’échec, tout simplement, de l’autre. « Tant que l’on aura ces disparités, on ne fera que de tous petits pas : agissons donc collectivement et très vite ! », poursuit donc la directrice.
Vers une transition massive à impact fort
« À chaque World Forum, on parle de prise de conscience, on met en oeuvre, et la machine se met en route. On voit les organisations trouver leur chemin », précise Jean-Pierre Letartre, « Pourtant, on a le sentiment en ce moment, avec l’accumulation des crises, que l’on peut risquer de s’arrêter sur le chemin. Attention, ne nous arrêtons pas ! » Président de Réseau Alliances, il appuie sa conviction que la proximité est la clé du changement. « Toutes les crises sont des opportunités de transformation », poursuit-il.
« Nous ne nous arrêterons pas », promet Simon Karleskind, Directeur régional de l’ADEME Hauts-de-France, « et les leviers d’action concrets, on les connait : c’est la décarbonations de l’industrie, des transports et des logements ». Et pour oeuvrer, le monde de la finance a aussi son rôle à jouer, comme le soutient Loïc Belhomme, directeur régional Hauts-de-France d’AG2R la Mondiale. « La finance n’est pas un monde de méchants », appuie-t-il ainsi.
D’ailleurs, Eric Campos, directeur de l’engagement Sociétal du Crédit Agricole S.A., va également en ce sens et précise plus tard lors de cette plénière : « Il n’y aura pas de transition s’il n’y a pas de transition juste ».
L’urgence d’une transition massive, juste et soutenue malgré les crises apparait ainsi comme un impératif incontournable. Les intervenants insistent sur le fait que les changements nécessaires ne peuvent pas être superficiels ; ils doivent être profondément impactants pour transformer véritablement les territoires et les entreprises. La clé de cette transformation réside dans une approche holistique qui intègre des solutions innovantes, des politiques environnementales ambitieuses et une collaboration étroite entre tous les secteurs.
« On parle des solutions pratiques, ici », note Nigel Topping. Et il a raison ! Au World Forum for a Responsible Economy, on pense les solutions ensemble, dès maintenant, pour une mise en action concrète et réaliste.
Sans sens, sans business modele durable, l’entreprise de demain passera à côté de bien des talents et de clients et cela, les actionnaires en sont bien conscients. Dans cette optique et pour assurer leur futur et leur durabilité, « on a autorisé et donné les moyens de leurs transformations aux entreprises », explique ainsi Barthélemy GUISLAIN, président de l’AFM – Association Familiale. « Plus l’actionnaire est affirmé dans ses engagements en faveur de ce changement, plus les équipes opérationnelles se sentiront à l’aise pour pouvoir et vouloir changer », souligne à son tour Élizabeth Cunin, présidente de Kiabi, « oui, l’actionnaire est clé, et le court-terme et le long-terme sont liés ».
La durabilité se prépare donc aujourd’hui, à tous les niveaux, et via toutes les générations, au bénéfice de tous.
Un appel à l’unité pour un avenir durable
La plénière de clôture s’est ainsi conclue par un appel vibrant à l’unité. Créer des ponts entre les industries, voilà la clé du développement durable. C’est en tout cas le propos de Mathias POVSE, qui souligne l’importance de se soutenir les uns les autres vers une décarbonation de nos industries. Et pour une solution décarbonée ouverte à toutes et tous, il faudra rassembler toutes les forces financières, sociales et géopolitiques. Rêvons grand !
D’ailleurs, « quel est votre plus grand rêve ? », questionne à son tour Maryna Saprykina, présidente-directrice générale du CSR Ukraine. L’experte demande à l’assemblée de prendre une minute pour partager son rêve à son voisin ou sa voisine. « Le mien, c’était de voir les rangées de lavandes, mais l’invasion russe en Ukraine a rangé ce rêve dans une petite valise. L’heure était à l’aide humanitaire, non à sa réalisation », explique-t-elle.
L’experte lance alors le U&We Hub program pour les femmes entrepreneurs déplacées, dont l’objectif est d’aider 10 000 femmes à créer ou à relancer leur entreprise sociale, de connecter l’ambition des femmes à leurs rêves par le pouvoir du collectif, et de maintenir l’économie de ces femmes à travers la crise qui frappe le pays. 700 femmes ont été formées à ce jour, et 4000 femmes ont ainsi pu bénéficier de ces enseignements. « C’est dans les crises que les valeurs ont leur rôle à jouer, c’est dans la résilience que la durabilité se crée », souligne l’experte. Et pour rester résilient, encore faut-il pouvoir entretenir sa santé mentale. Le secret de Maryna Saprynika ? « Le café latte », rie-t-elle, « alors que l’on n’avait plus de quoi chauffer quoi que ce soit l’hiver dernier, j’ai trouvé une source de résilience dans le café que j’allais chercher le matin au coffee shop près de chez moi ».
Et vous, c’est quoi votre « café latte », votre source de résilience ?
L’interdépendance entre acteurs est donc vitale pour parvenir à un changement réel. Les mécanismes existants, qu’ils soient internationaux, européens, nationaux ou locaux, sont tous nécessaires pour soutenir la transition vers une économie responsable et une unité globale. L’appel à la mobilisation de toutes les forces vives de la planète résonne comme une invitation à travailler ensemble, à s’inspirer mutuellement et à progresser collectivement vers un avenir plus durable.
La plénière de clôture de ce premier jour de World Forum for a Responsible Economy édition 2023 marque ainsi un tournant crucial dans la quête d’une économie plus responsable. Les échanges passionnés et les engagements concrets témoignent de la détermination des participants à travailler de concert pour inverser la tendance actuelle.
Valentine Leroy