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Mode et éthique : deux notions irréconciliables ?

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31F – Étudiant, engage-toi dans la mode responsable !

 

Avec le phénomène de fast-fashion inhérent à notre société depuis quelques années, la conscience éthique des citoyens se développe, avec une volonté de tendre vers une consommation plus durable.

 

Le problème de la fast-fashion

Depuis plusieurs années, la pratique de la « fast-fashion » s’est répandue dans nos centres commerciaux. Elle consiste en la mise en place de nombreuses collections, pouvant atteindre la cinquantaine dans des grosses enseignes telles que Zara ou H&M. Or, tout au long de son cycle de vie, le textile pollue. Lors de la production dans des usines rejetant du CO2, au moment du transport ensuite. En effet, l’extrême majorité des vêtements étant confectionnés en Asie, le textile, par ses déplacements importants, émet chaque année plus de gaz à effet de serre que le transport aérien et maritime réunis. Tout cela est d’autant plus aberrant que l’on ne porte en moyenne que 30 % de notre dressing, et que les Français jettent en moyenne 12 kg de textiles et chaussures par personne et par an. Les choses doivent changer. Certains entrepreneurs se sont saisis du problème et ont proposé des solutions possibles.

 

L’entrepreneuriat social : une solution de mode éthique

 

© Maxime Dufour Photographies

Pour faire bouger les lignes, certaines personnes ont décidé d’opter pour l’entrepreneuriat social. Il s’agit de résoudre un problème environnemental ou social en développant des solutions innovantes. Ces solutions servent de base pour définir un modèle économique durable visant à l’autofinancement, un système qui permet de réinvestir les bénéfices et ainsi faire grandir le projet. Cette bonne pratique s’inscrit durablement dans la dynamique de la RSE.

C’est le cas d’Amélie. Elle a créé il y a deux ans l’entreprise Trop Trop Bien ! qui réutilise des vieilles chemises pour les transformer en tabliers pour enfants. Ces derniers sont fabriqués dans un atelier de réinsertion sociale par des bénéficiaires du RSA, qui se forment ainsi à un nouveau métier. Chaque étape de la production est durable, puisqu’Amélie se fournit en tissu grâce à des dons.

 

 

 

 

 

L’avis d’une spécialiste sur le sujet

Nous avons eu la chance de rencontrer Anne Perwuelz lors d’un atelier au sujet de la mode éthique. Elle nous a éclairé sur son engagement.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis enseignant-chercheur dans une école d’ingénieur à l’Ensait, une école qui forme des ingénieurs textiles. À la base je suis ingénieur chimiste spécialisée en sciences des matériaux. J’ai toujours travaillé sur les matières !

Y a t-il eu un évènement qui vous a marqué et qui a pu provoquer un rapport plus responsable à la mode de votre part ?

À la fin des années 90, j’ai rencontré une finlandaise qui faisait de la recherche sur l’impact environnemental des textiles [et notamment de l’impact du] linge des hôtels. Elle m’a expliqué ce qu’elle faisait et ça m’avait paru incroyable. Et je me suis dit qu’il fallait que je fasse ça moi aussi, parce que c’est vraiment important de se rendre compte aujourd’hui que tous les textiles ont un impact. Comme je suis ingénieur chimiste, j’avais les notions de pollution que j’ai apprises à l’école. Mais là, [l’enjeu était] d’étendre tout ça sur tout le cycle de vie d’un produit.

Et sur quel type de matériaux vous travaillez ?

Je travaille sur tous les types de matériaux. Pour le moment je ne travaille pas sur la fibre de carbone par exemple, je reste plus sur des textiles traditionnels. Ce qui m’intéresse ce n’est pas seulement le matériau mais comment on le transforme, comment on le modifie.

Est-ce que vous pensez qu’il est trop tard pour renverser le phénomène de fast-fashion ?

Est-ce que vous avez une idée de quand est arrivé le mot fast fashion ? Parce qu’il y a 10 ans, personne ne l’employait, c’était un mot qui n’existait pas. Moi je dirais il y a 5 ans. Et effectivement, tout a changé. Je ne pensais pas que ça irait si vite. Tout d’un coup, les gens se sont rendu compte qu’on était dans cette surconsommation et que c’était affolant. Je donne un cours sur ces aspects environnementaux depuis 2006, les étudiants m’écoutaient [alors] gentiment parce que c’est quand même intéressant le développement durable. Mais depuis 4-5 ans, les étudiants sont vraiment très actifs. Ils ont envie d’agir. Votre génération est en train de tout changer.

Pour finir, pourrait-on connaître votre engagement pour l’Egothon ?

Justement ce matin je me suis dit que je n’avais pas pris d’engagement. Mais en fait, les engagements, je les prends tout doucement depuis toujours. Mon dernier engagement c’était il y a deux ans : je me suis rendu compte que le fait d’aller au boulot en voiture c’était de la débilité totale. Depuis, je limite complètement mes déplacements professionnels en voiture. J’aimerai bien faire zéro voiture pour aller travailler mais je sais que c’est un engagement que je ne peux pas prendre car je n’y arriverai pas. Mais j’aimerai bien tendre vers cela. Pour le reste, c’est vrai que ça fait longtemps que je consomme assez peu de vêtements, que je recycle.

 

Clotilde AVENEL
@clotildavenel
Jean DESROUSSEAUX
@JxnDesrouss